l'heure

La pendule affiche bientôt 9h30. Elle ne sait plus si c’est le matin ou le soir. Elle pleure. Réclame sa dose. Elle sent déjà disparaître cette sensation agréable qui l’extrait de la douleur. Elle redescend sur terre, et sait que ce n’est déjà plus sa place. Elle qui ne comprenait pas ce que son fils lui faisait subir, quand il enchaînait les shoots en se justifiant comme il pouvait. Lui non plus n’était plus fait pour ce monde là. Il avait tout essayé, jusqu’au bout tenté de vivre, à sa manière, au dessus des nuages, des réalités du quotidien. Elle n’avait jamais voulu comprendre. Jusqu’au jour où elle a elle-même plongé. Pour des raisons qui lui étaient propres. A son tour, elle s’est trouvé des excuses. Et quand les shoots de morphine n’ont plus suffi à faire efficacement disparaître les ravages du crabe qui la bouffait de l’intérieur, elle a choisi la même issue que son fils. Lui s’était jeté d’un viaduc, pour s’écraser au pied d’une pile de ce vieux pont. Il avait décroché, et s’est détaché du monde réel, laissant choir son corps de plusieurs dizaines de mètres, pour s’enfoncer dans la terre, pour faire disparaître à jamais la douleur de cette descente aux enfers. Elle, n’en avait pas la force physique. Elle a choisi ce que jamais elle n’aurait accepté de son fils. Ce dernier shoot, plus fort que les autres, pour oublier cette vie-là, beaucoup trop douloureuse. Comme un doux reniement de soi-même.

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